UN LIEN SANS NŒUD
Tressage manuel avec fibre de bananier et fer forgé manuellement
165 x 43 x 10 cm
2025
Il y a quelque chose de merveilleux lorsque la définition de la technique
articule un enseignement de sagesse.
La technique de la torsion employée pour composer cette corde permet de réaliser un lien sans nœud. Deux forces opposées s’entremêlent et créent ainsi un équilibre.
La corde peut s’allonger à l’infini, par ajout de fibres au fur et à mesure de la fabrication et bien au-delà permettant des pauses, des recommencements.
Ici, je choisis de laisser apparents chacun de mes gestes pour mettre en lumière la technique,
son enseignement et sa qualité esthétique brute. Le raccord des fibres forment un amas-nid.
La corde n’est pas arrêtée par une coupe radicale, les brins libres se montrent en cascade, en chevelure,
permettant à la fois de reconnaître la fibre utilisée puis de laisser la possibilité d’une continuité.
Pour ce travail, je mets à l’honneur la beauté brute et la qualité sculpturale du banal, du modeste
et de l’usuel. Cette sculpture est faite d’une corde végétale et d’un clou en fer forgé. Deux objets-outils ancestraux, apparus au cours de la préhistoire, ayant traversés le temps jusqu’à nos jours.
Pour être sculptées, ces deux matières doivent entrer au contact d’éléments naturels pour se ramollir, puis pour se figer. La fibre végétale est immergée dans l’eau de la rivière, tressée puis séchée à l’air, au soleil. Le métal est plongé dans le feu, lui-même alimenté par l’air, frappé, puis exposé à l’air pour durcir.
Comme toujours, je favorise le travail de la main sans assistance électrique. Je réalise la corde sans outils, seulement avec une torsion manuelle et le clou avec une forge manuelle. Attentive à la provenance des matières, la fibre végétale est issue de bananiers morts récupérés aux alentours de ma maison.
Le métal lui est recyclé à partir d’un ancien fer à béton.
Ces deux formes ordinaires sont chargées d’un imaginaire puissant. Elles m’intéressent notamment
dans le registre spirituel, pour leur statut de gardien, utilisées dans différents rituels de protection.
Symboliquement, la corde peut rappeler le shimenawa, corde sacrée du shinto, lorsque le clou peut faire écho aux “clous de fondation” retrouvés dans de nombreux temples en Mésopotamie ou encore aux clous retrouvés dans les sépultures romaines.